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pointj.gif (73 octets) Des textes littéraires de C.B.

 

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L'ensemble des chroniques de Bösersach. Fichier .rtf

  Charles Bösersach

  Mai 2000
  Charles Bösersach, bien ronchon

 
  Charles Bösersach  
 

 

 
 

« Ne résolvez pas les problèmes »,
Kevin Kelly in « New rules for the new economy ».

 

pointg.gif (57 octets) Nouvelle économie...

pointg.gif (57 octets) Mon problème, c’est que je ne sais pas grand chose des fondements théoriques (s’il y a), ou idéologiques (il y a) de ce que l’on appelle la « nouvelle économie » : je lis rarement les journaux, regarde parfois la TV (en vain), écoute distraitement la radio dans le bus.

pointg.gif (57 octets) Il s’agit — tout d’abord — de l’assemblage de deux mots qui a priori — m’agacent individuellement, — forment un assemblage particulièrement « modernisant » plus irritant encore. La « science » économique a souvent le don de m’horripiler, formalisant au forceps, ou entérinant des façons de faire, de vivre, de sentir rarement « pragmatiques » (la vie quoi; son désordre). Quand au mot « nouveau » il me semble relever de la « rhétorique » de base de tout débutant en marketing ou en communication.

pointg.gif (57 octets) Est-ce que l’essor du catholicisme, en son temps, peut être assimilé à ce qu’on appellerait une nouvelle économie?

pointg.gif (57 octets) Qui sont les acteurs de cette affaire, quelles en sont les règles, les objectifs... Surtout : qui en sont ou seront les victimes? Je ne peux m’empêcher de penser comme ça, en creux : dans quelle ressources puise-t-on pour maintenir « l’équilibre » du système. Et — à quoi sert-il?

pointg.gif (57 octets) Il m’arrive — souvent — de voir des jeunes gens risquer leur vie (ça n’est pas une hyperbole), à mobylette, pour livrer le plus rapidement possible des pizzas chez des quidams qui ont trouvé normal, amusant, pratique de décrocher leur téléphone (mais dit-on encore décrocher pour les portables?) pour déclencher cela. Une façon ordinaire et médiocre d'être résolument moderne, certes. Je ne sais pas si cela a à voir avec la NE; je crois. Cela concerne aussi évidemment surtout les gens qui passent des heures devant un écran, à cliquer, à entrer quelques mots ordinaires (prévisibles) dans un moteur de recherche (consulter à cet égard les « hit-parades » des mots les plus recherchés à l’aide des moteurs les plus courus (Yahoo!, Altavista...), c’est assez édifiant), en oubliant le boire et le manger, le conjoint, et d’arroser les plantes, fascinés par des gif animés, des scripts java puérils... C’est sans doute cela, la nouvelle économie; une facette de. Toute cette énergie, là derrière, là-dessous, déployée à mettre en place, maintenir, développer cette vaste hypnose qui, tôt ou tard (ne rêvons pas) fera porter la main au gousset. Même si la main et le gousset sont virtuels, les sous changent de place. France Télécom, pour le moment, semble être — en France — l’un des heureux bénéficiaires de cet engouement. Les marchands de PC « familiaux » également.

pointg.gif (57 octets) Surfez, créez votre site. Mettez-y vos photos de vacances réalisées avec un coûteux appareil numérique. Bienvenue au club des cyber-ridicules. Certains se gaussent sans parcimonie et recherchent avec délectation les sites les plus niais. Kitsch involontaire (mais le kitsch volontaire est-il possible?). Ça ne manque pas. Mettez votre CV « en ligne » (qui le lira?), mettez des heures à vous prendre pour un pirate en téléchargeant « en avant première » le dernier CD sans grand intérêt du dernier groupe à la mode. Il y a de quoi faire. Bien évidemment, frimeurs, poseurs, ne peuvent manquer le coche sans — probablement — se rendre compte de la nature « prothèsique » des produits concernés, ni de la dépendance à laquelle cela peut mener (ne pouvoir vivre sans les prothèses, d’une part, mais aussi « être toujours joignable » (l’horreur); par son patron notamment. Mais on ne dit plus « patron », c’est vrai).

pointg.gif (57 octets) Et cette pseudo-indépendance, liberté, autonomie, socialité, tout ce qu’on voudra, s’articule avec une sorte de fatalité fascinante avec ce qu’on appelle le « heavy cocooning » : cocon blindé (chez soi), mobile (voiture) et social (Internet). La zone d’ombre.

pointg.gif (57 octets) Toute cette mayonnaise sur les start-ups, les silicon-machin-choses (je préfère la regrettée Lolo Ferrari tiens) engendrera à terme bien des désillusions, je pense, même chez les lobotomisés des écoles de commerce ou de communication. Les orientations sous-jacentes cadrent bien également avec les inclinations (les instincts) du cAPITAL : micro-entreprises, out-placement, ne pas compter ses heures, être passionné, disponible, flexible, motivé, jeune, énergique, lisse, devenir l’éternel sous-traitant traquant en son sein l’abominable « non-qualité » pour, de toutes ses forces souriantes (mais c’est parfois un peu crispé) produire — du vent, de l’éphémère; du gadget. De la poudre de perlimpinpin. Mais sur ce presque rien à côté duquel une meringue ressemble à un méchant artefact de plomb, se greffe pléthore d’acteurs et de conseilleurs parasites. Comme quoi « rien ne sert pas à rien » pour antiphraser le respectable Claude Seyve (« Rien sert à rien. »). Ici ce serait plutôt : « Rien sert à tout ».
Quant au capital, devenu abstrait — et versatile, il empêche probablement que l’on (prolétaires de tous les pays, si si, il y en a) se coltine sérieusement et efficacement au problème. Le salarié devient précaire, le statut même de salarié est remis en question. Quel progrès ici?

pointg.gif (57 octets) D’après les spécialistes, la NE semble se définir selon quelques caractéristiques que nous énumérerons ci-après en vrac et après lesquelles nous grincherons bien évidemment.

 

pointg.gif (57 octets) Le savoir

Dans le cadre de la NE, on considère le savoir comme denrée de base (dommage que l’on ait pas opté pour la sagesse...). Le savoir ici ressemble furieusement à du pouvoir, avec cette capacité obligée, et gage de son utilité, à se transformer le plus rapidement possible en dollars.

 

pointg.gif (57 octets) La personnalisation de la demande

Où l’on oublie de préciser que c’est parfois le marchand qui personnalise la demande (biais des choix multiples prévus d’avance : on vous fait croire que vous avez le choix, en oubliant de vous prévenir : le vrai choix ce serait de pouvoir refuser de choisir). Quand on y croit un peu, c’est décevant : il n’y a jamais ce que l’on veut, le modèle — parmi la kyrielle proposée — désiré n’est pas disponible, la couleur choisie est en rupture de stock, les options désirées ne sont plus au catalogue, le délai indiqué ne concerne que le modèle de base sans options, etc. Alors on se rabat sur « le second choix ». Parce qu’à ce stade de prise de décision, on est râpé.

 

pointg.gif (57 octets) Les grandes unités se réorganisent en petites entités

Voire en ateliers autonomes, responsables, responsabilisés à outrance d’ailleurs, pas forcément bien rémunérés, et qu’il est loisible de faire disparaître si l’analyse (grand dieu!) et tous les tableaux de bord à la con révèlent une rentabilité insuffisante aux yeux des actionnaires principaux. Voir aussi : out-placement, essaimage (i.e. sous-traitance). « L’organisation matricielle se substitue aux structures pyramidales ». Matricielle — et volatile.

 

pointg.gif (57 octets) Les réseaux

Pour partager un volume d’information toujours plus important. Ben tiens. Et jusqu’où pourra-t-on pousser cet effet boule de neige? Très vite « on » est obligé d’utiliser des robots, des « agents intelligents » qui vaillamment, les pauvres andouilles, parcourent les axes et les chemins vicinaux de l’information, en quête toujours, sans fin, de l’information utile (à quoi on ne sait pas; ça tient de la thésaurisation; certains ont modélisé le temps qu’il faut à un honnête homme (je sais il n’y en a plus guère) pour prendre connaissance des publications relevant d’une seul domaine de spécialisation; le temps réel n’y suffit plus; d’où ce nécessaire temps irréel. Mais je m’emporte). On appelle ça « la veille ». On peut d’ores et déjà disparaître : les gentilles entités pétulantes dûment auto-programmées engrangent, synthétisent, comparent, croisent, heuristisent comme des bougresses. L’information comme denrée. Comme des grains pour les pigeons. Les pigeons ne savent probablement pas que l’on peut faire des dessins en disposant les grains selon certains agencements. Réseaux, le mot est à la mode. Avant, on faisait probablement la même chose, mais sans en faire une pendule.

pointg.gif (57 octets) L’Internet est devenu le grigris, la marotte des incantateurs politico-économiques. Et alors? Lorsqu’on brandit les chiffres des connectés, des non connectés (les sales gueux!), avec cette vertueuse hypocrisie qui consiste à vouloir faire croire qu’on parle de progrès, de bien-être quand on parle gros sous, on oublie également de parler de contenu. Ou plutôt : d’absence de contenu. Démultiplier — qu’on me pardonne — les mêmes âneries, qu’on trouvait déjà sur papier, sur écran TV ou à la radio, je n’en vois pas l’intérêt. On me convaincra lorsqu’on parlera de révolution en terme de réflexion, d’intellect ou d’éthique. Je suis récemment allé sur un Chat consacré à la musique indépendante. Non seulement le cul et la vulgarité la plus vile emplissaient tout l’espace, mais de surcroît chacun semblait parler tout seul. J’ai plusieurs fois posé la question de savoir pourquoi, dans une zone consacrée à un sujet spécifique, personne ne semblait s’en soucier, tenté de susciter une sorte de débat à cet égard, mais on n’a pas même daigné me répondre. Je devais avoir l’air niais, probablement.

 

pointg.gif (57 octets) La démocratisation de la technologie et du savoir

Waf. Est-il nécessaire d’argumenter? L’usage « intelligent » de ces technologies requiert des apprentissages, une culture et des compétences qui ne sont pas « donnés » et représentent des coûts, financiers, mais aussi en terme de temps, et d’efforts. De plus, en tant que signes de classe, on peut aisément imaginer une stratification et une « distribution » entre ce qui serait « réellement » « démocratisé » (et s’apparenterait davantage à de la consommation de masse, passive) de ce qui le serait moins (instruments de création et ou de contrôle, d’accès aux information nécessairement confidentielles (leur valeur même) et/ou complexes). Au reste, dans la pratique, actuellement, l’usage de ces matériels, durs ou mous (hardware/software, merci) s’avère bien souvent compliqué voire relever du rite initiatique, décevant, peu fiable, et rebute rapidement le débutant profane, fut-il convaincu.

pointg.gif (57 octets) « On », nous dit-on, investit des milliards afin d’assurer la cohésion des services que rendent ces infrastructures (les réseaux numériques par exemple) sans préciser bien au fond qui, et pourquoi. Qu’ « on » nous permette aussi d’être un tantinet dubitatifs quant au désintéressement et à l’humanisme de ces hons.

 

pointg.gif (57 octets) L’importance de l’innovation

On argumente sur les exigences grandissante de la clientèle (so : cyber-citoyen... ou cyber-client?), comme s’il n’y avait pas, du côté de l’offre, ces délires en cascade, cette inflation de « puissance », cette ivresse de technologie dépourvue de contenu, cette soif de nouveauté que le client échaudé ou prudent peut laisser passer un moment, « pour voir ». Cette attente « pour voir » permet de contempler l’apogée puis la rapide obsolescence et disparition de concepts qui semblaient destinés à bouleverser le monde et les habitudes. Pour en juger, relisez vos magazines d’informatique vieux d’un an ou plus. Certaines révolutions fracassantes sont déjà plus qu’oubliées (au profit de nouvelles « tendances », bien évidemment). Si je vous dit dataware?

 

pointg.gif (57 octets) Rapidité et constance des transformation

D’abord ça fatigue (comme vu précédemment). En outre, les changements incessants, augmentation de puissance, augmentation en complexité des logiciels également (et bricolage des plates-formes — remember le Windows 95 affranchi de la couche DOS...) oblige les utilisateurs (professionnels ou autres) à une perpétuelle « mise à niveau », épuisante et ridicule. Le but devenant rapidement : connaître les nouvelles fonctionnalités et s’habituer à la nouvelle interface complètement remaniée de la dernière version presque clean du traitement de texte Machin, et non plus « utiliser efficacement — utilement? — un traitement de texte ». Se mettre au goût du jour, tout en ayant à préserver les acquis (d’où : gestion de versions différentes de produits, parcs hétérogènes, normes multiplies, langages et syntaxes démultipliés...). Babel.

pointg.gif (57 octets) On argumente du gain de temps, sans préciser pour quoi en faire. Dégager encore du temps pour travailler? Accroître la productivité (qu’est-ce qu’il en a à faire, le mal-salarié, de la productivité?), mettre davantage de travail, de responsabilités et de pression dans le même laps de temps?

pointg.gif (57 octets) Quant à changer pour changer, voici une posture intéressante. Je pourrais ainsi, pour me montrer en phase, proposer que nous parlions d’autre chose, de géraniums ou de tomates farcies par exemple.

pointg.gif (57 octets) Peut-on imaginer un boom, une expansion continue? Peut-on s’empêcher d’imaginer (espérer?) des effets pervers? Et pendant ce temps-là, le monde, le monde d’avant, qui n’est pas oblitéré, qui n’est pas totalement virtualisable, comment va-t-il? Comment va-t-il continuer? Va-t-il souffrir d’un manque de financement ou d’intérêt (et de considération) au profit de l’économie virtuelle? Qui torchera le cul des vieux internautes quand ils seront touchés par la sénilité (si ce n’est déjà fait)? Des nymphettes virtuelles aux mains d’acier dans des gants de soie? Lara Croft herself?
   

  
Charles Bösersach  

Charles Bösersach

 
    

  
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